L’expatriation : les conseils d’une psychologue expatriée !
Pour préparer ou vivre une expatriation, rien de tel que de s’appuyer sur les témoignages de personnes expatriées !
Dans cet article, la psychologue Catherine MARTEL, elle-même expatriée depuis de nombreuses années, nous raconte son parcours atypique ainsi que son activité à l’étranger. Dotée d’une expérience unique, elle offre de précieux conseils à ceux qui souhaitent s’expatrier afin d’appréhender certaines difficultés.
Retrouvez également notre interview de Marie, expatriée à Berlin qui revient sur son installation à l’étranger et ses bons plans pour s’intégrer.
Pourquoi avez-vous décidé de vous spécialiser dans les expatriations ?
Parce que l’expatriation fait partie de mon parcours depuis plus de 25 ans désormais. J’ai été expatriée pendant 16 ans dans plusieurs pays, avec des périodes de retour en France. Je me suis à chaque fois fortement investie dans la vie associative, notamment auprès de l’accueil des nouveaux arrivants. Ma vie est finalement une vie d’expatriée.
Avez-vous entrepris d’autres choses à côté de votre activité de psychologue ?
J’ai plusieurs fois travaillé dans des lycées français, mais également avec Handicap International en Roumanie pour le recrutement de nouveaux professionnels de santé. J’ai enseigné dans une université au Vietnam, coordonné le cursus psychologie et suivi le travail des stagiaires.
Les opportunités professionnelles à ce niveau-là sont plus grandes qu’en France. En Autriche, j’ai ouvert un cabinet, afin de répondre à la demande locale en langue française. Il faut savoir que consulter un psychologue est très difficile quand on est expatrié à cause de la barrière de la langue.
Selon vous, quelles sont les personnes qui ont le plus besoin de vous ? Pourquoi ?
J’ai choisi d’aider les parents, car ayant moi-même vécu l’expatriation en famille avec nos trois enfants, je connais bien les différentes problématiques auxquelles sont confrontés les parents expatriés.
C’est pour cela que j’ai créé le groupe d’entraide « Expats Parents ». Il se trouve que plus de 80% des parents qui appartiennent au groupe sont des femmes ; sans doute car ce sont elles qui s’occupent davantage des enfants lors de l’expatriation.
A quel moment les expatriés viennent-ils vous consulter ?
(après leur arrivée, après quelques mois d’installation, après des
événements professionnels ou personnels importants…?)
Chaque période de l’expatriation a ses enjeux et ses défis. Ils sont simplement différents en fonction de la composition de la famille, de l’âge et de la personnalité de ses membres, du pays de résidence, etc.
S’expatrier pour la première fois avec de jeunes enfants est une autre aventure que celle de s’expatrier à un âge où nos grands enfants nous quittent. Je suis peu en contact avec les personnes qui ont décidé de s’expatrier, mais plutôt avec les personnes suiveuses ; celles qui ont décidé de suivre leur conjoint.
Quels symptômes retrouvez-vous le plus souvent chez vos patients expatriés ?
Les symptômes les plus courants sont les difficultés d’adaptation dans un pays, notamment celles des enfants, ce qui entraîne de la culpabilité et un sentiment d’impuissance chez les parents.
Je note aussi l’isolement, l’éloignement avec la famille ou les amis ainsi que le changement de statut pour les femmes qui ont dû arrêter leur carrière professionnelle pour suivre leur conjoint en expatriation.
L’expatriation est souvent un boost pour la carrière de l’homme mais est un frein pour celle de la femme, qui a pourtant généralement un niveau d’étude équivalent à celui de son conjoint.
Quelles peuvent être les conséquences du fait d’ignorer ces problèmes ?
Ignorer ces problèmes peut creuser un écart entre les parents d’une famille car l’un travaille beaucoup, a la pression d’assurer son activité car il a fait déplacer sa famille pour lui, tandis que l’autre se retrouve sans emploi, dans l’attente de pouvoir sortir et profiter de ses weekends. Cette ignorance peut générer à terme des difficultés et tensions voire même entraîner la séparation du couple.
Comment reconnaître qu’on a besoin de consulter un psychologue ? A quel moment ?
L’indicateur est lorsque l’on a le sentiment qu’on ne peut pas faire face aux difficultés seul, que l’on ne sait pas comment communiquer afin d’apaiser des tensions au sein de son couple par exemple, ou encore que l’on ne sait pas comment aider ses enfants inquiets du changement d’environnement.
Quels conseils donneriez-vous aux personnes qui vont s’expatrier ou qui sont déjà expatriées ?
Je leur dirai de bien préparer leur expatriation et celle de leurs enfants. De dialoguer au sein de la famille pour que chacun puisse exprimer ce qu’il ressent. De ne pas rester isolé, malgré la barrière de la langue.
Je conseillerais de s’intéresser au maximum au pays dans lequel ils vont s’expatrier, de rencontrer d’autres expatriés afin de partager des idées et conseils, et finalement d’adopter une démarche active d’intégration.
Que pensez-vous des consultations en ligne et d’Happineo ?
C’est une excellente alternative à la consultation en cabinet, notamment pour les expatriés qui n’ont pas toujours un psychologue à proximité qui puisse consulter dans leur langue. C’est vraiment une chance permise par les nouvelles technologies car ça ne nuit pas à la qualité des échanges. Cela peut même faciliter la libération de la parole car le patient se trouve chez lui et se sent de ce fait plus à l’aise.
Catherine MARTEL
Psychologue de formation et expatriée pendant plus de 15 ans, elle a
créé il y a 18 mois le projet Expats
Parents destiné à
faciliter la vie des familles expatriées. Aujourd’hui, le projet est
constitué d’un site collaboratif d’une trentaine d’auteurs, d’un
groupe Facebook très actif qui compte plus de 8000 membres, et qui
croît en permanence. Le projet a récemment remporté le 2^ème^ prix du
Public aux Trophées des Français de l’étranger organisés par Le Petit
Journal.